BlackHERstorymonth#8 : Nanny, l’héroïne nationale jamaïcaine.

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Pour clôturer cette série d’articles « BlackHerStoryMonth », j’ai choisi de vous présenter le portrait de Nanny, une héroïne nationale jamaïcaine. Née au Ghana vers 1686 et originaire de la tribu ashanti, Queen Nanny (ou Nanny) fut capturée avec des membres de son village lors de conflits inter-tribus et fut vendue comme esclave et envoyée en Jamaïque. Elle devint par la suite une des figures majeures de la résistance des marrons jamaïcains au dix-huitième siècle. 

Arrivée en Jamaïque, Nanny fut vendue à un plantation située à proximité de Port-Royal pour y travailler dans des conditions extrêmement difficiles. Influencée depuis le jeune âge par des leaders esclaves et des marrons, Nanny et ses frères Accompong, Cudjoe, Johnny et Quao s’enfuirent de leurs plantations et se cachèrent dans les Blue Mountains, un massif montagneux qui occupe le tiers oriental de l’île de la Jamaïque. Durant leur cavale, ils se séparèrent afin de s’organiser pour créer plus de communautés marronnes à travers la Jamaïque. Vers 1720, Nanny et Quao  se rendirent dans la commune de Portland et fondèrent une communauté s’étendant à 500 acres, nommée Nanny Town. Cet emplacement stratégique permit de repérer et d’anticiper les attaques des ennemis à une haute altitude  et rendit impossible toute embuscade britannique. Les marrons de Nanny Tow organisèrent aussi, entre autres, des tours de surveillance pour faire face à des éventuelles attaques.

Pour permettre à sa communauté de survivre, Nanny organisa un commerce basé sur du troc de nourriture, de vêtements et d’armes. Les marrons de sa communauté vivaient également de l’élevage du bétail, d’agriculture et de chasse. De plus, Nanny et ses compagnons organisèrent des raids dans les plantataions pour s’emparer les biens des maîtres esclavagistes, pour chercher de la nourriture et des armes, incendier les plantations et libérer des esclaves. En effet, des actions furent mises en place afin de libérer de plus en plus d’esclaves et les aider à s’installer dans les communautés marronnes. En trente ans, Nanny a libéré plus de huit cent esclaves.

La communauté de Nanny attribua les exploits de Nanny à des pouvoirs Obeah, dérivée de la religion africaine pratiquée dans les Caraïbes. Nanny fut également célèbre pour son grand savoir médicinal sur les herbes curatives et les méthodes traditionnelles thérapeutiques. Elle utilisa ses connaissances pour servir sa communauté afin de soulager les membres physiquement ou spirituellement.

La date du décès de Nanny n’est pas formellement établie. Dans le Journal of the Assembly of Jamaïca du 29-30 mars 1733 mentionna le capitaine Sambo, ayant combattu comme « esclave loyal » pour avoir « tué Nanny, la femme rebelle Obeah ». Le journal affirma que le capitaine aurait tué Nanny lors d’un assaut contre Nanny Town en 1733. Néanmoins, d’autres sources attestent que Nanny ne serait pas morte au combat mais de mort naturelle en 1760.

 Héroïne de l’histoire jamaïcaine, Nanny a marqué de façon profonde l’histoire de son pays. Pou preuve, celle qu’on surnomme « La Mère de tous les Jamaïcains » figure sur les billets de 500 dollars jamaïcains. Forte et résiliente, Nanny aura été une résistante énergique et sans concession face à la puissance britannique. Elle n’aura cessé tout au long de sa vie de lutter contre le système esclavagiste et de mettre tout en œuvre afin de libérer le plus d’esclaves possible. Son combat s’inscrit dans des mouvements de résistance initiés par les marrons et démontre que contrairement à une idée préconçue, les esclaves noirs n’ont pas subi de manière passive leur condition. Bien au contraire, ils n’ont eu de cesse de lutter et de se battre afin d’arracher leur liberté.

Comme d’autres figures de la résistante anti-esclavagiste, Nanny aura fait preuve d’abnégation, de courage et de bravoure pour s’engager dans une lutte qui allait au delà de sa condition personnelle mais une lutte universelle qui avait pour dessein de mettre fin à une des plus grandes abominations de l’histoire et garantir à tous les être humains l’égalité des droits. Pour cela, l’histoire et le parcours de Nanny force mon respect et m’inspire à me battre encore plus pour défendre les valeurs de justice, d’égalité et de tolérance auxquels je crois.

 

Comme l’an dernier, j’ai éprouvé beaucoup de plaisir à vous présenter pendant quatre semaines les portraits de Funmilayo Ankikulapo Ransome Kuti, Chica Da Silva, Phillis Wheatley et Nanny, des femmes noires qui ont marqué l’Histoire. Pouvoir me plonger dans leurs histoires, leurs parcours et leurs trajectoires  m’a permis de comprendre la portée de leurs accomplissements et l’importance de visibiliser ceux-ci. Un célèbre proverbe dit que « celui qui ne sait pas d’où il vient ne peut savoir où il va. » Il illustre parfaitement ce que j’ai souvent exprimé sur le blog, à savoir que la question de la représentation est essentielle dans un processus d’émancipation et d’autodétermination. Les femmes noires qui ont vu leurs accomplissements, leurs succès et leurs contributions effacés, invisibilisés et minorisés de l’Histoire ont besoin de se réapproprier les figures historiques féminines noires afin d’avoir des rôles-modèles auxquels s’identifier, qui leur ressemblent et dont les trajectoires sont inspirantes et puissantes. Des figures histoires qui font mentir les préjugés sexistes et racistes qui pèsent encore sur les femmes noires qui voient leur valeur et capacités sous-estimées en permanence en raison de cesdits préjugés.

La réappropriation de notre histoire est donc essentielle pour nous mais également pour nos filles, nos petites-filles car c’est fondamental dans notre construction de femme noire de savoir que nos aïeules furent des héroïnes, des combattantes, des guerrières, des reines, des cheffes et j’en passe, qui ont marqué l’Histoire de manière indélébile. Il nous appartient de nous éduquer sur ces figures histoires féminines noires et de transmettre leurs histoires et leurs parcours afin de continuer à les faire vivre et que leur héritage reste intact et se transmette de générations en générations. Un autre célèbre proverbe très à propos dit la chose suivante : « Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse continueront de glorifier le chasseur. » Autrement dit, il nous incombe, femmes noires, de nous saisir de notre histoire, de notre identité et de notre héritage afin de nous nous réapproprier ce que nous sommes avec fierté et dignité!

 

Sources :

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