Dernièrement, j’ai lu un article très intéressant sur le tabou de la dépression dans la communauté noire. On y aborde cette idée préconçue selon laquelle la dépression serait une maladie de Blancs dont les Noirs ne pourraient souffrir en raison leur grande capacité à surmonter les épreuves difficiles compte tenu de leur histoire douloureuse. Bien évidemment, il s’agit de clichés réducteurs car la dépression est une maladie mentale qui touche tous les individus sans considération de l’origine, du sexe ou de la classe sociale.
La lecture de cet article m’a fait réfléchir à la perception de la dépression chez les femmes noires. En effet, beaucoup de femmes afro-descendantes souffrent de dépression et n’osent en parler à leurs proches et à leur entourage par peur d’être ostracisées. Ce sentiment s’explique par l’idée très répandue dans la communauté noire qu’une femme ne peut souffrir de dépression en raison du fait qu’elle serait dotée d’une résistance à toute épreuve.
En effet, dans les communautés afro-descendantes, l’image de la femme noire est associée à la bravoure, au courage et à la résilience. Comme j’en parlais ICI et ICI, les femmes africaines sont les piliers de leurs communautés et leur impact sur l’histoire de leur continent est considérable. Néanmoins, ces qualités nobles qui leur sont attribuées deviennent en quelque sorte leurs « talon d’Achille » car elles les soumettent à une exigence de perfection qui est parfois irréaliste.
Considérées comme les piliers de leurs familles et de leurs communautés, c’est sur leurs épaules que reposent la stabilité et la pérennité de celles-ci. Par conséquent, on attend d’elles qu’elles soient fortes et qu’elles ne montrent aucun signe de faiblesse ou de désespoir. Cet état de fait explique pourquoi un grand nombre de femmes noires n’osent parler à leur entourage de la dépression dont elles souffrent et ressentent un sentiment de culpabilité et de honte. La peur d’être stigmatisées et d’être considérées comme « faibles » les poussent donc à garder le silence sur le mal qui les rongent.
Je considère que cette attitude qui consiste à ne pas accepter qu’une femme noire puisse souffrir de dépression est une forme de déshumanisation et d’oppression car cela l’enferme dans une espèce d’image chimérique et illusoire qui ne sert qu’à maintenir les apparences mais qui consume la principale intéressée à petit feu. C’est lui interdire d’avoir des émotions, des peines, des blessures, des doutes et des failles. C’est lui dénier la qualité d’être humain.
Toutefois, il ne s’agit pas de remettre en question les qualités exceptionnelles qui caractérisent les femmes noires mais de leur reconnaître également cette complexité et cette fragilité qui définit tout être humain. De plus, la force d’un individu se mesure à sa capacité à affronter les épreuves, à surmonter les obstacles et à s’en relever avec dignité et les femmes noires ont démontré à travers les siècles leur résilience face aux difficultés rencontrées.
Il est donc temps que les femmes afro-descendantes puissent s’exprimer sur leurs expériences de dépression et exprimer leur fragilité sans craindre l’opprobre de leurs communautés. L’auteure nigériane Chimamanda Ngozi Adichie a entrepris cette démarche en écrivant un article parlant de sa propre expérience avec la dépression. Même si la publication de cet article a fait l’objet d’une controverse, j’ai trouvé cela brave et courageux qu’une femme africaine s’exprime de manière aussi sincère sur un sujet aussi tabou dans nos communautés. Cela permettra sans doute, je l’espère, à de nombreuses femmes de déculpabiliser afin de pouvoir bénéficier de toute l’aide dont elles ont besoin tant au niveau médical qu’au niveau de leur entourage.
L’émancipation de la femme afro-descendante ne sera complète que lorsqu’elle sera libre de toutes les chaînes qui l’oppressent et qui la maintiennent dans une position d’infériorité. Reconnaître les faiblesses de la femme noire n’est en aucun cas une manière de la déprécier mais plutôt une façon de lui permettre de s’exprimer, de s’affirmer mais également d’exister. C’est par le seul biais de l’émancipation et de l’affirmation qu’elle pourra consolider sa place dans ce monde et accomplir sa destinée.
Wow bel article. En effet cette fausse idée reçue que la femme africaine est forte et ne peut pas où ne doit pas fléchir. Comme s’il y avait une honte à être faible l’espace d’un laps de temps.
Je reblog ton article
Peace 😉
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Merci beaucoup pour l’intérêt porté à mon blog!!!!
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A reblogué ceci sur In the eyes of Leyoparet a ajouté:
En finir avec les idées préconçues….
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Un article simplement réaliste!!!
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Merci beaucoup!!!
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L’article est bien écrit et je salue la référence à Chimamanda Ngozie que j’apprend à connaître à travers internet, cependant J’ai quelques questions (deux en fait) qui ont été soulevées dans mon esprit:
-Est-ce que la dépression est un tabou exclusivement féminin dans la société africaine?
-Deuxièmement Je suis un peu un novice s’agissant du perplexe: le problème ne vient-il pas aussi du manque de conscience des africains en général de leurs propres faiblesses?
Merci en tout cas
-
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Merci beaucoup pour le compliment! Pour répondre aux deux questions, je dirais que tout d’abord la dépression n’est pas un tabou exclusivement féminin en Afrique, les hommes en sont également victimes. Il existe en Afrique cette idée que la dépression est une maladie de Blancs et que les Noirs ne peuvent en souffrir (les hommes y compris). J’ai choisi d’axer mon article sur les femmes car la pression est plus forte sur elles compte tenu de la place qu’elles occupent dans la société et de l’image que les hommes africains s’en font.
Pour la deuxième question, j’y ai répondu d’une certaine manière dans la première car effectivement en Afrique, il y a cette idée que la dépression est une maladie de faibles et que compte tenu de l’histoire du continent, des conditions de vie des populations et également de la place importante de la religion, l’homme africain est plus résistant que le Blanc et donc ne peut souffir de dépression de toute autre maladie qui serait lié à une fragilité temporaire ou permanenente. D’ailleurs, j’entends beaucoup de gens dans mon entourage dire que la dépression n’existe pas en Afrique!
Donc c’est un problème plus global et plus complexe que je n’ai fait que survoler dans mon article et qui mériterait même une thèse! Lol!
Voilà, j’espère avoir répondu à tes questions du mieux possible!
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J’ai lu avec grand intérêt ton article. La dépression est une maladie encore incomprise, mal perçue en Afrique. Certaines cultures ont déjà réussi à définir cette maladie. Je viens d’une société africaine matriarcale et justement les femmes expriment beaucoup leurs émotions, le problème c’est les hommes qui n’acceptent pas le fait même qu’il soit possible d’être déprimé pour un homme. Les femmes parlent de « maladie de coeur » en langue locale pour designer tout problème qui conduit au stress et à la dépression. J’espère un jour les autres femmes en Afrique s’approprieront une expression à elles, mais là encore meilleure sera la guérison.
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Merci pour ce commentaire très constructif qui permet de comprendre que les réalités sont parfois différentes en Afrique en fonction du pays.
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Bonjour,
Tombée par hasard ici mais après moultes recherches sur les différentes représentations autour du féminisme, quelle belle chute, Je suis impressionnée par votre blog que je lis avec attention
Française d’origine algérienne, je trouve vos articles d’une pertinence inouie
Continuez!
Mes amitiés
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Merci beaucoup Cha! Je suis contente que mon blog vous plaise!😊
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